VII-1 - Un dogme sans histoire (2002)

Revue des Facultés de Théologie et de Philosophie

Présentation du premier volume du 7ème tome de la revue Théophilyon

Pierre Gauthier - L’Essai sur le développement de la doctrine chrétienne de John Henry Newman

Dans son grand livre de 1845, John Henry NEWMAN a pris conscience de l'insuffisance relative du critère de Vincent de Lérins (quod ubique, quod semper, quod ab omnibus creditum est), et s'efforce d'affiner la critériologie du développement du dogme. Il dégage au préalable, dans une première partie, la nécessité de ce développement, en raison notamment des obscurités de l'Écriture : en somme, la dogmatisation fonctionne, analogiquement, comme l' « accomplissement » par rapport à la prophétie ! Dans une deuxième section, l'auteur tente de distinguer entre développement authentique et corruption doctrinale. Il énonce sept critères de discernement à ce propos, depuis la « préservation de l'identité » jusqu'à la « vigueur durable ». Ce travail, qui va conduire NEWMAN vers le catholicisme, constitue un véritable « traité de la méthode » en théologie.

Jean-François Chiron - Attestation et détermination de la foi dans la dogmatisation de l’infaillibilité du XVIIe siècle à nos jours

La formulation du dogme du magistère infaillible du pontife romain, telle qu'elle a été élaborée à Vatican I, ne manifeste pas clairement que, lorsqu'il se prononce ex cathedra (determinatio fidei), le pape témoigne de la foi qui est celle de l'Église (attestatio fidei) : on avait en fait voulu couper court à d'anciennes controverses, en évitant de sembler soumettre l'acte pontifical au consentement des évêques, représentants de la foi de l'Église. Mais à l'heure où l'infaillibilité revient à l'ordre du jour, cette fois à un autre titre, on constate que le problème, traité par prétérition en 1870, se pose en fait toujours : lorsque le pape tranche une question disputée en déclarant qu'elle relève de l'infaillibilité au titre du magistère ordinaire et universel, sa déclaration constitue une véritable détermination, qui dépasse la simple attestation de la foi de l'Église : comment manifester l'articulation qui doit exister entre ces deux niveaux ?

François Bousquet - Dogme, dogmatique, dogmaticiens

Le dogme et la dogmatique n'ont pas toujours bonne réputation. L'article veut mettre en valeur leur fonction pour les discernements nécessaires dans la proclamation de la foi et pour la cohérence du discours chrétien. Les chrétiens n'ont pas le droit de tromper leurs contemporains sur les fondements de l'espérance. Par ailleurs, il veut signaler les dérives possibles d'une inflation de l'autorité doctrinale, typique d'un moment de la raison moderne où l'autorité de l'histoire s'amplifie, tandis que les modes d'exercice de la rationalité se diversifient et se complexifient. Après une brève histoire du concept de dogme, trois champs sont traversés : dogme et histoire, dogme et autorité, dogme et Écriture. D'un bout à l'autre est soulignée la nécessité pour l'Eglise de vérifier la manière dont est interprétée l'Écriture, afin que la prédication soit conforme à la Parole de Dieu. L'article se conclut en montrant l'élargissement du travail actuel des dogmaticiens en direction de la théologie fondamentale, pour les grands chantiers en cours : nouvelle évangélisation, œcuménisme, dialogue interreligieux.

René Virgoulay - L'articulation du fait et du sens dans le dogme

Comment et à quelles conditions le fait et le sens peuvent-ils être mis en rapport dans le dogme? Il importe pour cela de considérer le fait dans toutes ses dimensions, de lui reconnaître une intelligibilité qui ne s'épuise pas dans l'objet  de l'histoire et une polysémie qui le rend susceptible d'interprétation plurielle. D'autre part on refusera la conception extrinséciste du dogme que présupposent également, malgré leur opposition, l'intellectualisme (une spéculation détachée du fait) et le pragmatisme (une pratique réfractaire à l'idée). Ainsi pourra se nouer correctement un rapport qui est exigé par l'incarnation.

Thierry Wanegffelen - Le catholicisme moderne invente le dogme du sacrifice de la messe - Sur l’effet d’entraînement des controverses

Le catholicisme moderne invente le dogme du sacrifice de la messe - Sur l'effet d'entraînement des controverses L'histoire des dogmes doit prendre en compte la dimension « interconfessionnelle » des controverses qui ont marqué l'histoire de l'Église. Ainsi, on peut constater l'aspect « antiluthérien » de la désignation catholique de la messe comme « sacrifice ». Paradoxalement, si le Réformateur a contesté dès 1520 cette désignation, force est de constater que celle-ci, d'introduction récente, n'avait encore qu'une très faible diffusion ! C'est progressivement que la doctrine catholique devait s'élaborer sur ce point particulier, que l'on ne saurait par conséquent considérer comme « traditionnel ».

Bernard Meunier - Pourquoi les dogmes vinrent

L'Antiquité chrétienne (en particulier les IVe et Ve siècles) a fourni les premiers dogmes de l'Église. L'article essaie de comprendre le pourquoi du processus dogmatique, qui n'était pas une donnée a priori nécessaire du christianisme. Après avoir reconnu l'importance des déviances et des divergences doctrinales dans l'émergence d'une autorité (celle du concile œcuménique), on s'efforce de délimiter précisément la fonction ecclésiale et théologique du dogme en soulignant à la fois son caractère essentiellement négatif (barrer la route à l'erreur) et indissociable du contexte qui l'a produit. Le processus dogmatique n'est ainsi pas réduit à fournir un « corpus de  dogmes » qui jouerait simplement le rôle de catéchisme. On essaie enfin de cerner la dimension créatrice du dogme et son rôle paradoxalement libérateur.

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