Résumés des articles du second volume du 12ème tome de la revue Théophilyon
Étienne Perrot - Dans les rets économiques
Partant d'une définition sociologique du réseau comme capital social, le propos se dégage de cette approche utilitariste. Multiplexe de relations, le réseau suppose à la fois une infrastructure de communication et un opérateur symbolique capable de servir de signe de reconnaissance entre partenaires dont chacun des membres ne connaît souvent que l'appartenance des autres au même réseau. Peuvent être alors visitées les diverses dérives des réseaux, d'abord dans le champ politique où les réseaux côtoient les régimes maffieux, puis dans le champ économique où les réseaux permettent de répondre avec souplesse aux soubresauts des aléas économiques tout en sauvegardant des liens stables entre partenaires. L'économie des réseaux, comme champ économique particulier, se présente comme la valorisation des externalités positives pour les membres du réseau, et que l'on nomme en cette circonstance : l'effet de club. Cet effet, ajouté aux diverses organisations visant à contrecarrer l'incertitude des marchés, accentue l'hétérogénéité de l'espace économique, et livre la complexité socioéconomique à l'herméneutique de ces réseaux de ces éminents manipulateurs de symboles que sont les économistes.
François Euvé - La théologie et les réseaux
S'intéresser à la notion de « réseau », c'est évoquer spontanément notre environnement culturel contemporain : de la circulation des informations sur la « toile » mondiale de l'Internet à l'« auto-organisation » des systèmes biologiques, c'est une nouvelle logique qui est à l'œuvre. Cela ne peut pas ne pas affecter la réflexion théologique sur la création qui est censée rendre compte de l'origine et de la distinction des êtres créés dans leur différence avec le Principe créateur. L'article tente de penser théologiquement ce déplacement en reprenant d'abord le passage d'une métaphysique de la « substance » à une métaphysique de la « communication » (A. Delzant), puis de celle-ci à une métaphysique de la « structure » dynamique (A. Ganoczy). Trois notions clé sont examinées en finale : le corps, le temps et la liberté.
Olivier Perru - Le tout et les parties. Une philosophie des réseaux d'interactions en biologie
Le rapport entre les parties et le tout dans l'organisme vivant est une question philosophique dès l'Antiquité. Le lien de nécessité entre les parties et le tout au sens d'Aristote, se prend du côté des constituants matériels, voire du côté d'individus appartenant à une société politique. Cette nécessité des parties ne répond pas au sens strict à la causalité formelle qui supposerait l'arrangement et l'organisation de ces mêmes parties. Aristote a mis en valeur l'irréductibilité du tout aux parties, irréductibilité qui se retrouve sous d'autres formes, dans les approches modernes de la totalité biologique. Ce cadre conceptuel étant posé, l'article examine comment les spécialistes de modélisation biologique analysent aujourd'hui l'émergence de la vie organique, la production de « beaucoup » à partir de « peu ». C'est dans la dialectique du tout et de la partie que s'intègrent les tentatives de modélisations et de simulations du vivant. Les réseaux représentent alors une opportunité pour rendre compte des interactions du vivant vu comme système et décrire ses états d'équilibre, son évolution, y compris au niveau moléculaire.
Gérard Defois - Vivre l'Église dans une société de réseaux
Dans un contexte social où l'électif et le subjectif prennent la place du normatif et de l'objectif, revenir avec saint Paul à un imaginaire des réseaux internes au corps ecclésial n'est pas se réfugier en quelque vision primaire de la tribu ou de la féodalité, mais élargir de façon vivante ce que le rationalisme "bureaucratique" avait formalisé dans une logique uniquement formelle. Nous sommes renvoyés, tant sur le plan social qu'à celui de l'Église à l'image paulinienne du corps, ensemble vital de forces et de besoins, lieux d'échanges fondés sur la pluralité des services et l'interactivité des cellules et des réseaux. Il s'agit ainsi de donner toute sa mesure à la puissance spirituelle, à la grâce de Dieu, dans l'institutionnalisation de l'existence chrétienne, compte tenu de notre société de mobilité et d'urbanisation globale. Prendre acte du tissu associatif et fluide de notre situation culturelle, n'est-ce pas pour nous le défi de fonder une ecclésiologie de la transhumance ?
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