Résumés des articles du second volume du 11ème tome de la revue Théophilyon
François DURAND - Annoncer la résurrection. Qu’enseigner aujourd’hui à propos de la résurrection ? Que prêcher aux funérailles ?
Dire la résurrection est un véritable défi pour l'Eglise aujourd'hui. Nombre de nos contemporains ont choisi d'autres réponses à la question de l' « après-mort » ou ne savent pas comment l'envisager. Des chrétiens se refusent également à espérer la résurrection pour eux-mêmes ou pour leurs proches, sans doute parce que les concepts théologiques ont cessé de faire sens pour eux. Sans cacher que la foi à la résurrection demeure une pierre d'achoppement pour beaucoup, en essayant d'honorer les difficultés qui se présentent et en prenant la Pâque du Christ comme pierre d'angle, cet article de théologie pastorale se propose de repérer quelques éléments incontournables pour rendre compte de la résurrection. Il le fait notamment dans le cadre particulier de la liturgie des funérailles chrétiennes. La prise au sérieux de la rupture causée par la mort se révèle être un préalable nécessaire à toute annonce respectueuse des personnes et du mystère. Il est alors possible, en sollicitant le saut de la foi, d'établir un lien entre la situation du défunt et la mort-résurrection du Christ. Il reste ensuite à trouver des représentations symboliques ajustées, capable de tenir ensemble les dimensions de continuité et de rupture inhérentes au mystère de la résurrection.
Michel Demaison - L'âme au corps - Sur l'anthropologie de Thomas d'Aquin
L'évanescence de la foi en la résurrection de la chair chez les chrétiens est à relier au contexte général d'occultation des rapports entre le corps et cet « autre du corps » qu'on appelait naguère l'âme. Sur ce thème, nous présentons les structures essentielles de l'anthropologie de S. Thomas d'Aquin, comme exemple d'une argumentation philosophique rigoureuse, de facture aristotélicienne, structurant une réflexion théologique. Une articulation de ce type doit pouvoir soutenir les débats actuels avec les sciences et techniques du vivant et avec l'évolution des mœurs : à travers le corps des humains, ce sont toujours les personnes qui sont touchées en leur âme, donc en leur dignité. La tâche des théologies chrétiennes est, plus que jamais, de veiller à ce que les approches anthropologiques restent ouvertes à la dimension eschatologique qui définit tout humain, corps et âme.
Camille Focant - L'apport de Jean Delorme aux études sur l'évangile selon Marc
La contribution majeure de Jean Delorme aux études sur Marc est complexe, multiple et difficile résumer. L'article est centré sur un thème primordial dans ses recherches : la compréhension marcienne de l'évangile et de la communication. Il est ici traité en trois approches : la conception de l'œuvre de Marc comme récit qui est un évangile, conception éclairée à partir du commencement de l'évangile (Mc 1,1-3) ; sa compréhension de la communication parabolique (Mc 4,10-12) ; sa perception de la mystérieuse harmonie métaphorique entre la mort de Jésus, un parfum perdu et l'évangile (Mc 14,3-9). Ces trois exemples mettent en valeur les percées lumineuses opérées par Jean Delorme pour lire en profondeur le plus paradoxal et le plus étonnant des quatre évangiles canoniques.
Bernard MEUNIER - Le christianisme a-t-il une âme ?
Cet article s'interroge sur le langage de l'âme, traditionnel en théologie chrétienne depuis les Pères de l'Église. Ceux-ci semblent en effet avoir adopté assez vite l'idée grecque de l'immortalité de l'âme, considérée comme une partie intégrante de la foi. La contestation de la notion d'âme en anthropologie et de son immortalité en exégèse, oblige à faire une relecture critique de cette opinion reçue. Un parcours dans les textes patristiques, des deuxième et troisième siècles essentiellement, montre qu'à travers le langage de l'âme, les Pères ne visaient pas forcément le sens platonicien que l'on est prompt à soupçonner, et en particulier que ce langage n'implique pas chez eux de dualisme. Les auteurs chrétiens sont volontiers libres par rapport aux doctrines philosophiques (ils ne cherchent pas l'obédience à telle ou telle école, mais prennent leur bien où et comme ils le veulent), leur véritable critère est la conformité à l'Écriture. L'usage, à partir du quatrième siècle surtout, de la comparaison entre le Christ, homme et Dieu, et le composé humain, corps et âme, montre à quel point ledit composé est ressenti comme indissociable, puisqu'on recourt au modèle qu'il représente pour mieux dire l'engagement absolu et définitif de Dieu dans la chair, sans pour autant retenir l'idée d'une préexistence de l'âme que la comparaison aurait pu suggérer.
Christian Trottmann - Vision béatifique et résurrection de la chair : quelques remarques historiques et doctrinales
Si la béatitude éternelle consiste à voir Dieu, les facultés supérieures de l'âme devraient y suffire. Quel besoin dans ces conditions de la résurrection de la chair ? Cette doctrine ne constitue-t-elle pas pourtant une composante de première importance de la différence entre l'espérance chrétienne et celle des philosophes ? Quel sens donner alors à la décision doctrinale de Benoît XII en 1336 selon laquelle les âmes des bienheureux suffisamment purifiées voient Dieu sans intermédiaire, et cela dès à présent, sans attendre la résurrection et le jugement final ? Nous proposons ici des éléments de réflexion situant vision béatifique et résurrection de la chair au cœur de la recherche philosophique menée par les auteurs chrétiens de l'Antiquité tardive et du Moyen Age. Nous partirons d'Augustin et de sa conscience que la résurrection de la chair distingue l'espérance des chrétiens de celle des philosophes. Dans un second temps nous rappellerons les enjeux de la querelle avignonnaise de la vision béatifique. Enfin, nous montrerons à partir de deux exemples intervenant au lendemain de la proclamation doctrinale Benedictus Deus, les conséquences qu'elle entraîne sur la réflexion anthropologique concernant la vision de Dieu.
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