IDHL : 40 ans au service des Droits Humains
« Les guerres prennent naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix. » C’est autour de ce principe, issue du Préambule de l’Acte constitutif de l’UNESCO, que se sont réunis les fondateurs de l’Institut des Droits de l’Homme de Lyon il y a 40 ans. Dans un domaine plus que jamais d'actualité, cette modeste initiative est devenue un carrefour d’échanges florissants. Retour sur une aventure académique et humaine très particulière.
mise à jour le 7 avril 2025
UCLy
L’histoire de l’IDHL commence en 1984, inspiré par les principes du concile Vatican II. Le Recteur Gérard Defois (1984-1990) veut créer à l’UCLy un espace de réflexion et d’enseignement sur les grandes problématiques nationales et internationales liées aux droits fondamentaux en intégrant la doctrine du catholicisme social chère à l’UCLy. Pour créer et faire vivre cette structure, l’UCLy se tourne vers Emma Gounot et Pascale Boucaud, professeure en Droit. L'IDHL sera le deuxième Institut des Droits de l’Homme de France, après celui créé à Strasbourg par René Cassin après son Prix Nobel de la Paix.
Emma Gounot
La juriste Emma Gounot est l’une des figures emblématiques de l’UCLy. Fille d’Emmanuel Gounot, Doyen de la Faculté de Droit, Emma suit ses traces et rejoint l’UCLy en 1939. À seulement 22 ans, elle devient la première femme à y enseigner le droit. Elle sera aussi la première Doyenne de la Faculté. Comme avocate, elle défend des résistants pendant la Guerre, notamment les journalistes de Combat en 1942. À l’UCLy, elle a marqué les esprits par son tempérament innovant, à la pointe dans le domaine de la protection de l’enfance, du droit de la famille et de la formation des adultes.
L’équipe s’enrichit vite, en intégrant le professeur Joseph Yacoub, historien, politologue et grand spécialiste du Droit des peuples autochtones. « Cette équipe enseignante a donné à l’IDHL une identité pluridisciplinaire dès ses débuts » explique Joseph Yacoub. « La question des Droits Fondamentaux ne se limite pas au Droit, il faut intégrer l’Histoire, la sociologie, la philosophie… »
A son ouverture dès 1985, les premiers cours de l’IDHL ne rassemblent qu’une petite poignée d’étudiants motivés. Ces premières classes ont laissé leur empreinte sur l’institut. Aujourd’hui encore s’efforce de recruter ses étudiants sur des critères humains, plutôt que sur leurs notes. « L’engagement, c’est la marque de l’IDHL. Quand on étudie les candidatures, on ne s’arrête pas aux résultats académiques, on s’intéresse à l’engagement des étudiants, à leur parcours humain » explique Sandrine Cursoux-Bruyère, directrice de l’IDHL. Et malgré la faiblesse des moyens d’origine, les thématiques choisies relèvent déjà d’une actualité brûlante ! « Terrorisme, sécurité et démocratie », « Misère et violation des droits de l’homme », « Peuples et communautés sans état », « Racismes et antiracismes contemporains »... Autant de disciplines qui ont encore aujourd’hui une place de choix dans le cursus des étudiants.
C’est à partir de cette volonté de confronter étudiants et professeurs aux sujets les plus difficiles du monde contemporain que se construira la « marque de fabrique » de l’IDHL. Son enseignement mêle théorie et réalité pratique, avec une expérience issue du terrain. Dès ses débuts, l’IDHL travaille avec des journalistes, des juristes ou des activistes à travers le monde.
« Découvrir ou redécouvrir l’Histoire de l’IDHL, c’est reconnaître l’intuition de ceux qui ont fondé ce projet il y a 40 ans » explique Grégory Woimbée, Recteur de l’UCLy. « La connaissance des Droits de l’Homme est indispensable à leur reconnaissance et à leur protection. »
Le Droit à l’ouverture
En 2005, l’IDHL se rapproche de l’Université Grenoble-Alpes pour la création d’une formation « Histoire, Droits et Droits de l’Homme » qui permet à l’institut de délivrer un Master de Droit reconnu par l’État. Une étape importante pour la reconnaissance de l’IDHL et de ses étudiants dans le monde universitaire.
Mais si l’IDHL dispense un Master en Droit, pourquoi ne pas rejoindre une Faculté de Droit ? Pour Sandrine Cursoux-Bruyère, directrice de l’IDHL, cette question anodine révèle les spécificités et les ambitions de l’institut. « L’IDHL n’est pas seulement un pôle de formation, c’est un Institut des Droits de l’Homme » explique-t-elle. « Nous avons des objectifs et une approche différente de celles d’une faculté de Droit. »
A l’IDHL, la formation des étudiants n’est donc pas un but en soi, c'est un moyen au service d’une cause plus vaste. « La mission de l’IDHL, c’est de sensibiliser et de contribuer au respect des Droits Humains partout où il y a des besoins » ajoute Sandrine Cursoux-Bruyère. Dans ce but, l’institut choisit ses formations pour leur impact, avec un soin particulier pour les sujets à la pointe des luttes pour les Droits Fondamentaux : peuples minoritaires, personnes en situation de handicap, étudiants issus de pays en voie de développement…
Etudier le Droit à l'international, l'expérience d'une étudiante
Amani Kouadio est étudiante dans le Master 2 Droit des libertés – Pratiques du droit international et régional des Droits de l’Homme de l’Institut des Droits de l’Homme de Lyon de l’UCLy. Elle poursuit un double-diplôme en Italie, grâce au partenariat entre l’IDHL et l’Université de Padoue, pour se plonger dans des études en droit international.
Découvrez son portrait, et son parcours.
Dans un monde en constante évolution où apparaissent de nouveaux défis, la formation de l’IDHL ne peut pas se figer sur les enjeux d’hier ou les spécialités de ses enseignants. « Nous cherchons à rester dynamique sur les besoins de la société » explique Sandrine Cursoux-Bruyère. « Notre formation est là pour répondre à ces besoins sinon elle ne sert pas à grand-chose. »
Découvrez l'ensemble des formations de l'IDHL
Un projet international
S’il y a un élément par lequel l’IDHL se démarque dès le tout début, c’est par son engagement à l’international. « En fondant l’Institut, nous avons compris qu’il nous fallait obtenir une reconnaissance Internationale. » raconte Pascale Boucaud. Dès les années 90, l’IDHL est en lien avec les instances européennes et onusiennes et crée son réseau auprès des ONG de défense des Droits de l’Homme. Des échanges académiques s’établissent avec Dublin et Malte, l’institut forme magistrats et journalistes au Liban, en Bolivie, en Équateur, puis en Europe de l’Est suite à la chute de l’Union Soviétique. Mais c’est en Afrique que se noueront les liens les plus forts.
La Chaire UNESCO de l'UCLy
Créée en 2007 à l’IDHL, la Chaire UNESCO a pour objectif principal d’engager une réflexion de fond sur les enjeux de l’interculturalité et en particulier sur la place et l’évolution des sociétés à l’heure de la mondialisation.
La Chaire est prise en charge par une équipe d’enseignants de l’UCLy, formée de personnes, de disciplines et d’origines culturelles diverses. Dans leur pratique professionnelle, ces enseignants sont quotidiennement appelés à travailler, dans le cadre de leurs cours ou de leurs recherches, sur la dimension interculturelle et interreligieuse.
« Nous continuons à travailler en priorité sur les zones géographiques qui ont le plus besoin d’une formation aux Droits Humains » ajoute Sandrine Cursoux-Bruyère. Aujourd’hui, plus de la moitié des étudiants de l’IDHL proviennent de l’étranger. Pourtant, loin de la logique du recrutement d’étudiants d’élite à l’international, l’attention de l’institut se porte en particulier sur les régions où les besoins d’éducation et de défense des Droits Fondamentaux sont les plus criants.
Au-delà de la formation académique, l’IDHL poursuit également un engagement sur le terrain grâce à des liens avec des associations et des organismes humanitaires à travers le monde. « Les Droits Humains n’existent que lorsqu’on se parle » raconte Joseph Yacoub. « La vie de l’IDHL est une rencontre permanente avec un monde aux multiples cultures, blessées par les guerres et assoiffées de paix. »*
Dans un monde qui prend chaque jour une teinte un peu plus cynique, il faut du courage pour continuer à croire à une mission de défense des Droits Humains. Mais découvrir l’Histoire de l’IDHL, c’est faire apparaître la richesse de l’apport de cet institut unique au sein de l’UCLy. « C’est une immense fierté pour notre communauté universitaire de pouvoir célébrer avec vous ces 40 années d’engagement et d’excellence » affirme le Recteur Grégory Woimbée. « Nous ne célébrons pas seulement un anniversaire, nous célébrons une vision. Celle d’un avenir ou les Droits Humains continuent d'être une lumière qui nous guide, une lumière que nous portons tous. »
Le monde du Droit à l'UCLy
De nouvelles formations en droit sont ouvertes depuis septembre 2022 à l’UCLy. Interview du Doyen du Pôle facultaire des Sciences Juridiques, Politiques et Sociales et Directeur de la Faculté de Droit de l’UCLy, Michel CANNARSA.