Dans le cadre du Cycle de conférences « Mémoire et Marche du Monde » (2è Édition) et de la Décennie Nelson Mandela pour la Paix (2019-2028), instituée par les Nations Unies, notre Chaire Unesco organise une conférence publique sur le thème :
De la Révolution française (1789) à la lutte contre l'apartheid en Afrique du Sud
Informations pratiques
Mercredi 10 mai 2023 (18h-20h)
Amphi A. Aristote A154
Université catholique de Lyon
10, Place des Archives
Lyon 2ème
Conférencier
Argumentaire
Quand on parle des idées référentielles ayant pavé le long chemin de la victoire sur l’apartheid en Afrique du Sud (et dans toute l’Afrique australe !), cela renvoie généralement à la non-violence inspirée de Mahatma Gandhi et de Martin Luther King, au principe humaniste d’Ubuntu qui aura d’ailleurs permis de poser les bases institutionnelles de la « Nation-arc-en-ciel », aux valeurs chrétiennes portées avec foi et détermination par Desmond Tutu (Prix Nobel de la Paix 1984) ou encore Allan Boesak, à l’influence des systèmes politiques anglais et américain, aux idées communistes, etc.
Pourtant, comme l’explique Nelson Mandela lui-même dans son ouvrage intitulé Un long chemin vers la liberté (Fayard, 1994), l’esprit de 1789 et le modèle révolutionnaire français étaient tout aussi déterminants dans les rangs des mouvements sud-africains de libération. Ainsi en est-il du fameux Congrès du peuple de Kliptown (1955) qui s’était conclu par une Charte de la Liberté, un texte référentiel pour la lutte de libération sud-africaine, tout comme la Convention fondatrice du Congrès national africain (Anc) de 1912.
En effet, dès ses dispositions préambulaires, la Charte de la Liberté déclare que le peuple a été dépossédé de son droit, « de la liberté et de la paix par une forme de gouvernement fondée sur l’injustice et l’inégalité. » Le texte précise également que l’Afrique du Sud ne sera jamais ni prospère ni libre tant que le peuple ne vivra pas dans « la fraternité et ne bénéficiera pas d’une égalité de droits et de chances. » Expression de la volonté du peuple, « Blancs et Noirs ensemble, égaux, compatriotes et frères », la Charte de 1955 considère que « seul un Etat démocratique, fondé sur la volonté du peuple, peut assurer à tous leurs droits naturels sans distinction de couleur, de race, de sexe ou de croyance. » Les autres dispositions exposent bien évidemment les exigences premières pour une société juste et démocratique : le gouvernement du peuple par le peuple, l’égalité des droits, le bien-être et la juste répartition des richesses nationales...
S’adressant à Nelson Mandela, François Mitterrand s’était employé à rappeler, à juste titre, le lien indiscutable entre les valeurs républicaines françaises et le combat de celui qui a lié son propre destin à la libération de son peuple : « Vous êtes l'homme de Liberté au fond des cachots, l'homme d’Égalité au pire de la discrimination, l'homme de la Fraternité face au fratricide du racisme. » Dans cette allocution de 1990, en hommage à Nelson Mandela et à son épouse lors de leur visite en France, quelques mois seulement après la libération du futur président sud-africain, François Mitterrand fera également remarquer : « Si la France est la patrie des droits de l'homme, elle est la vôtre. »
S’il est tout à fait possible de parler de l’influence du républicanisme français dans la lutte contre l'apartheid en Afrique du Sud, quels en sont véritablement les éléments d’analyse et d’explication ? Par ailleurs, au-delà des considérations historiques qu’il convient de rappeler, en quoi l’universalité des idéaux du républicanisme de 1789 peuvent-ils concrètement faire sens aujourd’hui, hic et nunc, face aux nouvelles formes d’apartheid à travers le monde ?